UN NOM ET UN INSIGNE 

C’est au printemps 1969 que l’escadron 03.60 reçut son nom de baptême et son insigne. 

Pourquoi ESTEREL ? Il nous faut avouer que le choix était assez restreint. Officiellement, les nouvelles unités crées doivent recevoir le nom d’un fleuve, d’une montagne ou d’une région de France métropolitaine. C’est peut-être plus prudent ! Nous avions tout de suite pensé à reprendre le nom de Bretagne. Les bretons bretonnants sont nombreux au sein du Transport aérien militaire et les sympathisants ne se comptent pas. Mais les mêmes caractéristiques doivent se retrouver chez les Bombardiers qui ont recueilli le nom de l’escadron de THIES après sa dissolution. 

Le COTAM nous communique donc une liste de noms, dressée par le Service historique des armées. Peu d’entre eux sont utilisables et même si nous les avions choisis, il est probable qu’ils n’auraient pas été acceptés. BEAUJOLAIS et CORBIERES nous auraient peut-être donné l’occasion de nous faire parrainer agréablement. NORMANDIE-NIEMEN est célèbre, aussi avions-nous envisagé un moment de proposer BEAUJOLAIS-CORBIERES ; mais les alcooliques, assure-t-on, sont rares et nous appliquions déjà la 6 A avant la lettre. Nous pouvions également choisir MARCHE, ce qui aurait permis aux crevards de trouver facilement une devise pour l’escadron. MANCHE exige une certaine modestie qui n’a jamais été la caractéristique première du 3/60. BRIE fait un peu quart de portion. COMTE de FOIX évoque irrésistiblement, pour les gastronomes habitués des missions présidentielles, le pâté du même nom, sinon de la même région. Finalement, nous avons décidé d’opter pour les noms qui avaient la sonorité la plus agréable. 

A l’occasion d’un référendum –à cette époque, l’appel fréquent aux citoyens était de rigueur- près de quatre vingt dix pour cent des votants et des inscrits choisissaient ESTEREL (1). Venaient ensuite QUERCY et COTENTIN. Toutes les autorisations nécessaires et les appuis utiles nous ont été donnés très volontiers ; il nous a seulement été demandé d’expliciter les raisons de notre choix. Nous avons répondu officiellement que « le sable chaud et le bleu de la mer de cette région ensoleillée nous rappellent les horizons lointains auxquels nous sommes habitués». Il parait que c’était là des raisons très sérieuses. Effectivement, au bout de trois mois environ, un message annonçait que l’Escadron de transport 03.60 avait gagné sinon ses lettres de noblesse, du moins son nom de baptême ESTEREL.

Quand à notre insigne, voici comment le définit le vocabulaire héraldique : «globe terrestre de forme elliptique aux continents d’émail blanc et mer d’azur, chargé d’une ceinture d’atomes d’or et de sable et à senestre d’un quadriréacteur du même ». plus prosaïquement, l’insigne ovale représente un globe terrestre sur lequel les continents sont blancs et les mers bleu clair. L’Esterel a pour domaine de travail le monde, ou du moins la planète Terre. En bas à droite se détache une silhouette noire de DC8. Il est probable –et c’est bien regrettable !- qu’l faudra de nombreuses années avant que le DC8 ne soit un avion périmé au sein du COTAM. Et lorsque nous en serons là, sa silhouette sera devenue folklorique. Une ellipse marquée de quatre points ceint le globe. Elle peut rappeler que les avions de l’Esterel font de temps en temps le tour du monde –deux fois au mois de mai 1973, par exemple !- à moins que les points ne représentent des électrons, plus précisément le rayonnement alpha, ce qui signifierait que la vocation première de l’ESTEREL est de travailler au profit de la Direction des Centres d’Expérimentations Nucléaires. 

Pour la petite histoire, c’est le second avion de l’escadron le FRAFB qui fut le premier à porter le nouvel insigne. Son premier vol du 3 au 7 août 1969 le mena à NOUMEA via MONTREAL, LOS ANGELES et TAHITI, avec 158 personnes à bord, au profit du bureau des Transports Maritimes Aériens et de Surface. Quinze jours plus tard, le FRAFA perdait l’insigne du GLAM qu’il portait jusqu’alors. 

(1) A propos de consonance,  contrairement à ce que nos pochettes d’allumettes pouvaient laisser croire, ESTEREL s’écrit et se prononce sans accent. La preuve de l'erreur sur une rescapée --->